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une mère inquiète tente de trouver un médecin pour son fils handicapétemoignage

Trisomie 21 : mon combat pour faire soigner mon fils sans le traumatiser

Publié le 11/08/2022 - par Bénédicte Demmer | 7 min de lecture

Clotilde est maman d’un petit garçon atteint de trisomie 21 qui supporte mal d’être touché. Chaque soin de santé est une véritable épreuve émotionnelle et logistique pour lui comme pour sa mère, à l’image de ce jour où elle a “simplement” voulu faire soigner une carie.

Une carie. Juste une carie. Pour la plupart des gens, quand une carie se déclare, la principale problématique est de trouver un rendez-vous chez le dentiste. Mais pour soigner un enfant porteur de handicap, c’est carrément le parcours du combattant ! Donc, le jour où j’ai aperçu cette carie, j’ai paniqué.

Je m'étais préparée depuis un moment, à ce qu’un jour, ce genre de problème arrive. Je le savais parce que, tous les ans, quand on va chez le dentiste, c’est la débâcle. C’est pareil pour tous les examens d’ailleurs. Aujourd’hui, mon fils connait bien notre médecin, il accepte qu’on écoute son cœur, mais il faut y aller tranquillement. Pour les prises de sang, on a de plus en plus de mal à le contenir, alors pour lui ouvrir la bouche, nous qui avons déjà du mal à lui laver les dents correctement, je savais que ça allait être extrêmement compliqué.

Il vit chaque contact physique comme une agression

Mon fils baptiste a 9 ans et demi. Il est atteint d’une trisomie 21, un handicap génétique qui provoque plusieurs choses dont un retard mental. Baptiste a de gros troubles de l’oralité et une hypersensibilité au niveau de la tête (un trouble neurosensoriel selon les médecins). Depuis qu’il est tout petit, à chaque fois qu’on entre en contact avec lui, il le vit comme une agression. On ne peut pas lui regarder dans les oreilles, par exemple, on ne peut pas non plus lui mettre de lunettes. Pour lui couper les cheveux, je suis obligée de le faire quand il dort.

C’est en réussissant à lui faire ouvrir la bouche au cours d’un jeu que j’ai pu apercevoir cette carie. J’ai donc contacté, un réseau spécialisé à Lyon qui suit Baptiste depuis 3 ans. Je l’ai fait rentrer dans ce réseau parce que, normalement, ils proposent tout un protocole de désensibilisation pour les enfants qui, comme lui, ne peuvent pas ouvrir la bouche. J’avais espéré qu’il puisse en bénéficier, mais ça n’est jamais arrivé… On m’a répondu qu’il n’avait pas besoin de soins à ce stade. Mais moi, tout ce que je voulais, c'était qu’on puisse au moins le préparer à ouvrir la bouche pour le jour où ça serait nécessaire, parce que je connais mon fils, je sais que ça prend du temps. Je sais qu’il ne va pas se laisser faire, qu’il souffre et que je vais devoir finir par le maintenir et je n’ai pas envie de ça.

Une détresse partagée sur les réseaux sociaux

Ce qui m’a mis hors de moi en plus de tout ça, c’est qu’ils m’ont demandé un certificat médical de mon médecin traitant alors qu’ils suivent Baptiste depuis 3 ans. Non seulement ils n'ont pas pratiqué la désensibilisation comme prévu, mais en plus, le jour où il y a une urgence, on me demande d’aller voir mon médecin pour cocher des cases ! Lorsque je suis rentrée, j’étais désemparée, j’ai voulu exprimer ma colère et la partager sur les réseaux sociaux.  J’ai donc écrit un post sur mon compte Linkedin.

En parallèle, j’ai contacté un médecin qui fait des soins dentaires pour des personnes atteintes de handicap sous anesthésie générale. En insistant, j’ai réussi à décrocher un rendez-vous dans son agenda, malgré des délais d’attente très longs suite à un désistement. Mais avant, il a demandé un bilan pré-opératoire dans le même réseau de santé bucco-dentaire et handicap que j’avais contacté avant. Encore un sac de nœuds…

Une attente interminable pendant laquelle on s’inquiète

Et toutes ces étapes, n’étaient que pour une première inspection ! Je n’étais toujours pas à l’étape du soin pour cette fameuse carie. Une attente interminable durant laquelle on s’inquiète parce qu’on sait que les problèmes dentaires peuvent rapidement mal tourner. Et si ça commençait à lui faire mal ? Si ça empirait ? Qu’est-ce qu’on allait bien pouvoir faire ? Nous n’avions pas de solutions. J’avais peur qu’il se mette à avoir super mal d’un seul coup et qu’il ne comprenne pas, parce que, lui, il n’analyse pas comme nous, il n’aurait pas compris pourquoi. Et puis cette carie est sur une molaire définitive, je n’avais pas envie d’en venir à une dévitalisation parce qu’on partait pour plusieurs rendez-vous et des mois de galère.

Une spécialiste trouvée grâce au post Linkedin

J’ai finalement obtenu le rendez-vous chez le dentiste. Mais entre temps, j’ai trouvé une aide à laquelle je ne m’étais pas attendue grâce à mon post sur Linkedin. Beaucoup de parents d’enfants handicapés m’ont contacté pour me raconter avoir vécu la même situation et savoir si j’avais trouvé une solution. J’ai reçu des aussi des conseils pour apaiser la douleur et beaucoup de messages de professionnels de santé. Aujourd'hui, j’ai probablement les numéros de tous les dentistes de France qui s’occupent des enfants handicapés.

Parmi eux, une pédodontiste pratiquant proche de chez nous m’a contacté. Elle connait très bien le handicap et c’est elle qui va maintenant suivre Baptiste. Elle pratique la désensibilisation, un ensemble des mêmes méthodes liées à l’autisme que le réseau aurait dû mettre en place avec lui. Et elle va aussi mettre en place des méthodes d’acclimatation. Nous allons aller une première fois dans son cabinet, sans qu’elle ne lui fasse rien pour qu’il puisse juste voir à qui ça ressemble. Elle va nous donner des photos de tous les gens qui travaillent là-bas, un miroir à mettre régulièrement dans sa bouche pour l’habituer. Elle va essayer de lui faire ouvrir la bouche sans le restreindre au protocole classique, de l’obliger à rester assis dans le fauteuil. S’il ouvre la bouche dans la salle d’attente et bien ça n’est pas grave, c’est là qu’elle l’auscultera.

Eviter le scénario traumatisant pour maintenir l’enfant en place

Mon fils pourra être en confiance. C’est lui qui acceptera de lui-même, sans passer par des médicaments pour le calmer, sans passer non plus par un scénario traumatisant où il va se débattre et devoir être maintenu par nous ou des infirmiers, comme on m’a déjà proposé, parce qu’on ne pouvait pas prendre le temps de soigner mon fils en pensant à son bien-être. Les familles sont abandonnées dans un espèce de néant où elles doivent elles-mêmes fabriquer les solutions pour faire soigner leurs enfants dans la dignité avec des spécialistes qui n'ont ni le temps, ni les moyens de faire ces prises en charge.

 

En savoir plus sur Prête moi tes Ailes, l'Association de Clothilde Jenoudet : 

En sortant de leur isolement les familles touchées par le handicap cognitif et en particulier la Trisomie 21, le principal objectif de Prête-moi tes ailes est de tisser des liens. Les rencontres familiales du samedi après-midi organisées tous les mois et demi par l’association permettent aux enfants porteurs d’un handicap de se lier très tôt entre eux et de se rendre compte qu’ils ne sont pas seuls. 

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Ma philosophie

Ne faire que ce qu’on peut faire : quand on a un enfant en situation de handicap on est noyé sous tout ce qu’il faudrait faire, les bonnes méthodes, les bilans, les bonnes façons de les faire lire... Tout ça m’a mené au bord du burn-out, à force de vouloir tout faire. C’est pour ça que maintenant, je confie à ceux dont c’est le métier, les choses que moi je ne peux pas faire comme la rééducation, par exemple. Je préfère faire moins pour qu’on passe de bons moments en famille. Parce que si je ne vais pas bien, ma famille ne va pas bien. Il faut que les parents et très souvent même les mamans, comprennent qu’ils sont le moteur des familles et que si le moteur ne tourne pas bien, la famille ne peut pas bien avancer.

Mon conseil pratique

Mon conseil pratique : Ne pas hésiter à utiliser les réseaux sociaux pour avoir des réponses et bons contacts. Mais tout ça dans la sérénité, parce que dans la colère et la rage il en ressort rarement quelque chose de bons. Les réseaux sociaux sont une mine d’or d’information.

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Ici, Ma Boussole Aidants prend un parti assez différent : celui de s’attacher à ce qu’il est possible de faire, pour s’organiser et fonctionner au quotidien avec son proche, pour se comprendre et communiquer. Les déficiences sont un fait, mais leurs conséquences peuvent parfois être atténuées par de petites stratégies notamment en lien avec l’environnement matériel et social.

Tout en gardant à l’esprit que les situations sont très différentes d’une personne à l’autre, et qu’il n’y a pas une seule bonne façon de faire, Ma Boussole vous propose ici des articles et des témoignages pour vous aider à mieux comprendre ce qui se joue à différents moments clé généralement rencontrés quand on accompagne un proche malade ou en situation de handicap. Quand c’est le cas, ils pourront aussi vous aiguiller sur ces comportements au quotidien qui peuvent faciliter certaines situations.