Un homme atteint d'Alzheimer et son fils partagent un café

Maladie d'Alzheimer : l’absence de certitude comme seule certitude ?

Michel, médecin et aidant de sa maman atteinte d'Alzheimer, explique la difficulté d'avancer avec une maladie pour laquelle beaucoup de choses restent encore inconnues.


Michel, médecin et aidant de sa maman atteinte d'Alzheimer, explique la difficulté d'avancer avec une maladie pour laquelle beaucoup de choses restent encore inconnues.

En tant que médecin, je me suis beaucoup intéressé à la maladie d’Alzheimer et aux maladies apparentées. J’ai développé des outils de diagnostic, puis d’aide, de soin et d’accompagnement pour les patients atteints par ces maladies et leurs aidants. En parallèle, j’ai côtoyé longtemps ces maladies en tant qu’aidant familial puisque ma mère et ma sœur ainée ont, elles aussi, eu la maladie d’Alzheimer. C’est d’ailleurs le diagnostic de ma mère qui, dans les années 80, m’a poussé à étudier le sujet et à m’engager dans l’association France Alzheimer

Je fais donc partie d’une "famille à risque" concernant cette maladie d’Alzheimer, que je connais si bien en tant que professionnel et en tant qu’aidant. J’aimerais partager ici les étapes du diagnostic que je risque de devoir affronter, si un jour moi aussi je présente quelques troubles de la mémoire qui rappellent cette maladie si familière.

L’honnêteté, la base de la confiance entre le médecin et son patient

Je connais, pour l’avoir vécu de l’intérieur, le discours médical soulignant l’importance du diagnostic et de la vérité due au malade. Mais ce que je sais aussi, c’est que la "vérité" n’est pas forcément si claire que ça… Si l’on découvre sur la radiographie de vos poumons une image "suspecte", votre médecin vous proposera de réaliser une biopsie de cette lésion et le résultat de cette biopsie permettra de vous dire sans hésitation, si oui ou non vous avez un cancer du poumon. La vérité est ici unique et peut être annoncée au patient, qui pourrait à juste titre protester si cette vérité lui était cachée. Dans la maladie d’Alzheimer, on ne pratique pas de biopsie et donc il n’y a jamais de vérité absolue. Le diagnostic est toujours "probable" et jamais "certain" et le médecin ne peut que partager avec le patient et sa famille ses questionnements.

Les étapes du diagnostic de la maladie d’Alzheimer

Dans un premier temps mon médecin me proposera des «tests», ce que l’on appelle un bilan neuropsychologique. Ce bilan va permettre d’étudier la façon dont je me sers de mes "fonctions cognitives": la mémoire, le langage, la reconnaissance visuelle, l’exécution des gestes, et enfin la coordination des toutes ces fonctions dans les actions complexes. Ce bilan permettra de faire un état des lieux de mes difficultés mais aussi de ce qui fonctionne bien. Cela sera un premier pas pour avancer dans le diagnostic.

La seconde étape sera de me proposer une IRM pour tenter de "voir" les lésions suspectées au cours du bilan neuropsychologique. Le plus souvent l’IRM ne va faire que confirmer ce que l’on sait déjà : si j’ai des troubles de la mémoire, il y a de fortes chances pour que mon hippocampe (le siège de la mémoire dans le cerveau) soit atrophié. L’IRM n’aura fait que confirmer ce que le bilan avait montré. Mais cette atrophie est-elle due à la maladie d’Alzheimer ou non ? Impossible de le savoir.

Pour aller plus loin, il faut savoir que la maladie d’Alzheimer se caractérise par le dépôt anormal dans le cerveau de deux protéines. Ce dépôt anormal peut se traduire par des anomalies biologiques, mais décelables par la seule ponction lombaire, qui n’est pas forcément très agréable. Ce dépôt anormal peut aussi être «visualisé» par une fixation anormale dans mon cerveau de marqueurs spécifiques de ces deux protéines. Là encore cette troisième étape ne permettra que de prouver ce dépôt anormal, mais ce dépôt peut s’associer à d’autres anomalies, en particulier chez les personnes âgées, et nous n’aurons pas la certitude qu’il s’agit d’une «vraie» maladie d’Alzheimer.

Le bon accompagnement, plus important que la certitude du diagnostic

Et finalement, est-ce que le plus important ne serait pas que mon accompagnement soit déterminé par les difficultés que je rencontrerais dans la vie quotidienne, plus que par la certitude ou non que je souffre de la maladie d’Alzheimer ?

Ma philosophie

L'accompagnement au quotidien, le "care" comme disent les anglo-américains, est essentiel. Il peut être accompli par les professionnels, par les familles et par les bénévoles, qui pourront ainsi échanger leurs points de vue et leurs façons de faire.

Mon conseil pratique

L'humanité, l'écoute et la capacité d'empathie des accompagnants sont des bons critères pour les choisir !