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Le repli des familles à cause du regard des autres
Le repli sur soi et la difficulté à demander de l’aide sont des problématiques répandues chez les aidants. “Le sujet est souvent tabou, on n’ose pas charger la responsabilité à quelqu’un, on le cache. Certains vont même renoncer à participer au repas de Noël en famille dans la crainte que le proche fasse quelque chose d’incontrôlable face aux autres qui ne sont pas habitués”, explique Emmanuelle Merveille, coordinatrice de la Plateforme des Aidants Sud et Ouest Charente.
“Nous avons fait le choix de passer le repas de Noël uniquement entre moi, mes frères et sœurs et ma maman et réduire les rassemblements vers l’extérieur, explique Marie, aidante de son frère polyhandicapé. Mon frère a besoin d’être porté pour le moindre déplacement et ça peut être très fatiguant sur un séjour. La logistique pour loger chez ceux qui habitent loin est aussi compliqué puisqu'il a besoin d’un lit médicalisé. Il y a aussi d’autres paramètres. Mon frère et très sonore, parfois il crie, c’est sa façon de s’exprimer. Il bave aussi. Lorsqu’il était enfant, c'était toléré, mais aujourd’hui avec son physique et sa voix d’adulte ça peut choquer les gens qui n’ont pas l’habitude. C’est très difficile et ça demande du temps d’accepter ça. Au début, on a honte, on a peur pour lui, on a peur qu’il soit jugé, et petit à petit, on apprend à vivre avec son proche tel qu’il est et tant pis pour ceux qui ne l’acceptent pas.”
Parler de sa situation aux autres, c’est déjà un début de répit
Si dans certains cas le partage n’est pas souhaité ou qu’il ne donne aucun résultat, dans d’autre “parler de sa situation à quelqu’un ou à sa famille peut être un début de répit. Car avoir une famille avertie qui puisse comprendre la situation, c’est une possibilité de soutien et de ressources en plus pour partager l’accompagnement”, souligne Emmanuelle Merveille, habituée à accompagner les aidants au quotidien.
Pourquoi ne pas tenter de demander à une petite-fille, qui en a envie, de venir passer l’après-midi avec sa grand-mère ? Cela vous permettra de vous dégager du temps et resserrer les liens familiaux et sociaux. Pourquoi ne pas demander à une tante ou un cousin de s’occuper de votre enfant handicapé si elle ou il a déjà proposé de le faire, le temps de préparer un repas ?
L’occasion pour les autres de prendre conscience de la dépendance
“En janvier, on constate souvent une augmentation des appels provenant de personnes qui souhaitent obtenir des renseignements pour aider un de leur proche qui est aidant. Les rassemblements familiaux pendant les fêtes permettent à ceux qui habitent loin, ou qui n’avaient pas été impliqués jusque-là, de constater la réalité de la situation par rapport au vieillissement ou la maladie d’un proche et des répercussions que cela représente pour l’un des membres de la famille”.
Bien évidemment, d’autres réalités s’imposent. Dans le cas de certains handicaps ou certaines maladies, on ne peut demander à sa sœur de savoir "au pied levé", comment s’occuper d’un parent atteint d’Alzheimer ou de sa fille autiste.
Avoir l’habitude de s’occuper d’un proche au quotidien, c’est développer un lien particulier. On a peur de déléguer l’accompagnement parce qu’on sait exactement la façon dont il peut réagir à certaines choses. Ce qu’il aime et ce qu’il n’aime pas aussi. En étant le seul à s’occuper d’un proche, on pourrait s’identifier comme l’unique sachant à propos de la maladie ou du trouble qui le touche ainsi que les soins qui en découlent. Pour Emmanuelle Merveille, “il est important d’essayer de faire confiance aux autres. De déléguer l’accompagnement à une personne qui peut avoir une autre approche. Pour qu’un tiers puisse prendre le relais, il faut aussi lui laisser le temps d’avoir et de comprendre ses maladresses pour les rattraper.”
S’informer et se former en famille
Si vous ne savez pas comment en parler à vos proches ou qu’à l’occasion des fêtes, des membres de votre famille s’intéressent à votre situation, vous pouvez leur transmettre des brochures ou des guides relatifs à la pathologie concernée. “Il existe aussi des formations, suggère la coordinatrice en Plateforme de répit. Beaucoup d’associations en proposent, comme France Alzheimer, par exemple. Ça permet de comprendre les difficultés et aussi les maladresses qu’on peut avoir face à une situation inhabituelle. C’est ça aussi les fêtes de famille ! Contribuer et renforcer les liens sociaux. Il ne faut pas hésiter à avoir confiance en la capacité de sa famille à s’adapter aux situations difficiles.”
Noël, pas forcément le bon moment pour aborder le sujet ?
Dans d’autres cas, certains n’ont pas envie de parler de la pathologie du tout parce qu’ils n’en ressentent pas le besoin ou parce que l’historique familial est compliqué. D'autres veulent juste profiter des fêtes, de leur famille, voir du monde et penser à autre chose. C'est tout à fait normal. Tout est une question d’identifier son besoin sur le moment et bien le communiquer à ses proches. Avec la fatigue et le stress, les fêtes de fin d’année ne sont peut-être pas la meilleure période pour tester la délégation de l’accompagnement avec quelqu’un d’autre non plus.
“Je crois que Noël, n’est pas nécessairement le bon timing, avoue Marie. On reçoit des gens de l’extérieur qui peuvent poser des questions interprétées comme des jugements. Comme par exemple : ‘Pourquoi tu lui donnes à manger un repas mixé ? Tu pourrais tenter autre chose pour Noël’. Sur le moment, on a juste envie de répondre à l’autre qu’il ne sait pas ce que c’est, parce que le cadre est déjà tendu par l’organisation alors que cette réflexion pouvait être maladroite certes, mais bienveillante. On a juste envie de rester sur un esprit de convivialité, de joie et de légèreté sans être ramené à ce genre de problème. Mais parfois, on y est ramené malgré nous.”
Si le sujet s’invite à table, on peut inviter ses proches à ne pas le creuser le soir du réveillon, mais proposer de se retrouver après les fêtes pour en reparler. “Si des mains se tendent, même de manière maladroite, ça peut valoir le coup de saisir l’occasion”, propose Emmanuelle Merveille.
La médiation familiale en cas de conflits appui à la communication
La communication est un point essentiel dans les liens familiaux. Parfois, on ne sait pas comment la mettre en place, ou les choses se passent mal. “Il est important de connaître l’existence des dispositifs de médiation familiale proposés dans les Udaf de France”, rappelle Emmanuelle Merveille. Les séances sont orchestrées par une tierce personne professionnelle, habituée à faciliter la communication dans des contextes complexes comme l’amorce de discussion autour du handicap et de la dépendance. Chacun est amené à faire entendre son point de vue et ses émotions. Le médiateur aura pour rôle d’aider tous les participants à trouver des compromis et mettre en place des solutions. Il s’agit parfois simplement d'instaurer des bases de communication, aider à mettre des mots sur des situations compliquées à partager avec les autres ou encore cadrer et faire faire reconnaître l’accompagnement.
Le partage est un levier, compliqué à saisir, mais utile pour aider une famille à affronter une situation. Pendant les fêtes d’années, les membres de la famille éloignés sont souvent plus disponibles et ouverts aux coups de fils et aux visites, c’est peut-être une occasion à saisir. Si vous n'avez pas envie ou que la configuration familiale est trop compliquée, il existe des solutions pour déléguer l'accompagnement de votre proche temporairement à des professionnels qualifiés.
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