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Accepter que celui qu’on a connu ne soit plus le même
Quand on parle de la maladie de Parkinson, on évoque le plus souvent les troubles moteurs comme les tremblements, mais on ne parle peu des troubles cognitifs. En ce qui me concerne, ce qui est le plus difficile à vivre, ce sont tous les petits changements que je constate jour après jour dans la personnalité de mon mari, à mesure que les troubles cognitifs apparaissent. J’ai 66 ans et je suis aidante de mon mari qui est parkinsonien depuis 17 ans. Sa maladie s’est déclarée lorsqu’il avait 58 ans, il en a aujourd’hui 75.
Pendant les 10 premières années, il avait des petits troubles moteurs comme les fameux tremblements ou de la rigidité. Ces derniers se sont vraiment accentués depuis six ans, entrainant des pertes d’équilibre ou des chutes. Mais depuis deux ans, je constate un petit déclin cognitif. Cela a commencé par des petits oublis, des répétitions, des troubles de l’attention et de la concentration, une humeur changeante en cours de journée sans qu’il se soit passé quoi que ce soit. Au début, ça semble anodin, puis à force, on le remarque.
Parfois, je retrouve mon mari comme autrefois
Mon mari vient du Sud-Ouest, avant, c'était quelqu’un de joyeux. Aujourd’hui, il a une forme de tristesse, une sorte de déprime qui s’installe en lui. D’ailleurs, avant que le diagnostic ne soit posé, la maladie s’est manifestée par une sorte de dépression. Mon mari avait beaucoup d’humour, il aimait raconter des histoires qui nous faisaient toujours rire. Aujourd’hui, il a des difficultés à prendre la parole quand il y a beaucoup de personnes. Il oublie quelques morceaux, il a parfois du mal à trouver ses mots alors ça tombe à plat. Quand je vois que les gens décrochent ou lui coupent la parole pour changer de conversation parce qu’il est trop lent, ça me fait mal au cœur. Je déteste ça, parce que les fois où il prend la parole sont de plus en plus rares.
L’acceptation du changement est compliquée. Cette maladie vous rapproche et vous éloigne à la fois. Il y a des choses qui ne se font plus parce que ça n’est plus possible et ça vous éloigne. Parfois, je retrouve mon mari comme autrefois, souvent le matin. Quand il se lève, il est bien et sur le coup de midi, il est de moins en moins bien, certainement à cause de la fatigue et des médicaments. Je passe par des périodes, où je suistrès protectrice et maternelle et d’autres moments où je me dis ça n’est plus possible. Je lui en veux et puis ensuite je m’en veux à moi.
J’ai tendance à trop faire à sa place
J’ai sans doute, une part de responsabilité dans ces changements. J’ai tendance àfaire à sa place lorsque je le vois en difficulté ou qu’il est trop lent, cela a pu entrainer un certain confort chez lui et un manque de stimulation. Je me suis arrêtée de travailler, il y a huit ans. J’ai eu ma maman chez moi aussi, elle était atteinte d’Alzheimer. J’avaispris l'habitude de faire beaucoup de choses pour elle et j’ai reproduit avec mon mari ensuite. Il veut souvent m’aider à la cuisine, mais il a des difficultés dans certains gestes, à couper les carottes ou les pommes de terre, par exemple. Ça m’agace un peu, alors je le fais pour lui. Parfois, On craque et c’est normal. J’essaie de me corriger, mais ce n’est pas facile.
Des changements qui vous projettent dans un avenir incertain
Il faut faire le deuil de beaucoup de choses. De la vie que nous avions ensemble, nous allions souvent au ski, par exemple mon mari étant originaire des Pyrénées, mais aujourd’hui ça n’est plus possible. Il a également dû renoncer à conduire. Tous ces changements sont difficiles à accepter parce qu’ils vous projettent dans un avenir incertain. Je me suis évidemment renseignée sur la fin de vie des malades de Parkinson, mais ils sont tous différents. En ce qui nous concerne, je me dis que ça ne va pas trop mal. Mon mari peut encore marcher et il est relativement autonome, il n’y a que pour tout ce qui est motricité fine qu’il a des difficultés (mettre ses chaussures, faire ses lacets, etc.). J’essaie aussi de voir tous ces points positifs pour me remonter le moral quand j’ai un petit coup de mou.
Continuer à avoir des projets ensemble pour tenir sur la durée
Pour tenir dans la durée et garder le cap, je m’astreins à avoir des projets et à les réaliser. Nous nous sommes aussi inscrits à l’association France Parkinson, les activités et l’ambiance nous ont plu. Et s’il est heureux, alors je suis heureuse aussi. Il faut continuer à faire de l’activité physique, voir du monde, avoir des activités, des projets ensemble. L’année dernière, on est parti pour la première fois de notre vie en cure, trois semaines dans les Pyrénées. Il est toujours partant pour faire quelque chose. Ça, ça n’a pas disparu. En ce moment, j’ai besoin de me remettre en forme alors tous les matins, je vais marcher et il vient avec moi.
Il faut également se garder du temps pour soi sans son conjoint, c’est important, même si ça n’est pas toujours évident. J’essaie de sortir, de voir mes amies. Il y a quelques années, quand mon mari pouvait encore rester seul, je suis partie deux semaines en Inde et ça m’a fait un bien fou de m’occuper de moi, parce que j’en avais perdu habitude.
Ma philosophie
Il faut rester positif : la recherche avance, il y a des avancées très prometteuses dans la médecine. Pour l’instant, on essaie de trouver des solutions. Cette maladie progresse doucement et chaque jour, on s’adapte. On avance pas à pas.
Mon conseil pratique
Ne pas rester seule et avoir des activités pour soi : ça n’est pas toujours évident de trouver du temps pour soi, mais c’est très important. Il ne faut pas s’isoler et continuer d’avoir une vie sociale.