Les raisons du refus de l’entrée en maison de retraite
Il est essentiel de comprendre les raisons de son refus pour pouvoir clarifier certains points qui peuvent être flous et rassurer votre proche. Elles peuvent être diverses :
- Le refus de quitter son domicile après des années à vivre dedans. Le domicile a un côté rassurant et il renferme des souvenirs importants pour votre proche.
- La peur de ne pouvoir assumer le coût de l’établissement. Les maisons de retraites et Ehpad, coûtent souvent plus chers que la pension de retraite de la personne âgée. Il faut savoir qu’il existe des aides pour permettre à votre proche de pouvoir y aller, même s’il n’a pas les ressources suffisantes.
- Devoir s’accommoder à un nouvel environnement, surtout à cet âge. Il n’est pas facile de quitter un lieu connu pour un lieu rempli d’inconnus. Certaines personnes âgées craignent de ne pas trouver leur place, de se sentir isolés. Ils perçoivent cela comme un abandon de la part de leurs proches et cela peut amener les aidants à culpabiliser.
Proposer des solutions alternatives
Lorsque le maintien à domicile est encore envisageable, plusieurs alternatives à l’entrée en maison de retraite peuvent être mises en place, afin de respecter le souhait de la personne âgée tout en assurant sa sécurité et son confort. Il est possible de combiner différentes solutions adaptées :
- Les intervenants à domicile : Ils rassemblent les services d’aide à domicile, le portage de repas, les soins infirmiers à domicile (SIAD)
- L’aménagement du logement : douche à l’italienne, barres d’appui, monte-escalier, domotique, etc.
- L’hébergement temporaire : Accueil de jour, hébergement temporaire dans des Ehpad.
- Les habitats alternatifs : Les résidences séniors, les colocations entre personnes âgées, l’accueil familial.
Quand le maintien à domicile n’est plus possible
Il arrive un moment où, malgré tous les aménagements mis en place, le maintien à domicile n’est plus envisageable sans mettre en danger la santé ou la sécurité de la personne âgée. Dans ce cas, il est important de poser un cadre d’évaluation objectif et d’avancer étape par étape, sans précipitation.
- Faire constater la perte d’autonomie : le médecin traitant est le premier interlocuteur pour évaluer l’état de santé général. Une demande d’APA (Allocation personnalisée d’autonomie) permet aussi de faire intervenir une équipe médico-sociale du conseil départemental, qui établira un plan d’aide en fonction du niveau de dépendance (GIR).
- Évaluer les risques concrets : des chutes répétées, un isolement social sévère, des troubles cognitifs (désorientation, déni de la maladie) ou encore une mauvaise observance des traitements peuvent alerter sur le fait que la vie à domicile devient trop risquée.
- Envisager une protection juridique si nécessaire : lorsque la personne refuse toute aide malgré une situation de danger, ou qu’elle n’est plus en capacité de prendre des décisions éclairées, une curatelle ou une tutelle peut être demandée auprès du juge des contentieux de la protection. Il s’agit d’un dernier recours, à utiliser avec discernement, uniquement lorsque l'autonomie de décision est gravement altérée.
L’importance de la communication : comment aborder le sujet ?
Avant de commencer à aborder le sujet, il faut chercher les bons mots pour amener cela de manière respectueuse. Il ne faut pas infantiliser son proche et respecter ses droits. Il est essentiel de lui expliquer que son état de santé n’est plus compatible avec un maintien à domicile et que celui-ci représente un danger pour lui.
Pour aborder le sujet, vous pouvez prendre l’exemple de personnes âgées de votre entourage qui sont maintenant en maison de retraite et qui le vivent bien. Vous pouvez également lister les avantages et les inconvénients d’une entrée en maison de retraite,
afin de montrer qu’il est bénéfique pour lui d’intégrer un établissement spécialisé. Aussi, n’hésitez pas à le rassurer sur vos liens et vos visites et celle de sa famille après son emménagement.
Le docteur Céline Martinez, psychologue clinicienne spécialisée dans l’accompagnement des aidants et leurs proches, nous explique comment procéder. “Il faut travailler en concertation avec le médecin, faire une médiation familiale pour mettre au milieu de la table la situation réelle. Il ne faut pas hésiter à détailler la situation réelle sur l’état de santé de votre proche, que vous n’êtes plus en mesure de l’accompagner de manière sécurisée. Demandez à votre proche ce qu’il imagine dans un Ehpad idéal. La résonance va faire baisser d’un cran la colère. Vous pouvez avoir plusieurs rendez-vous si un seul n’est pas concluant.
Pour faciliter la transition, on peut commencer par la visite d’une personne du milieu qui vient juste boire le thé à la maison, pour tisser un lien et créer une première accroche. La mise en relation progressive n’implique rien dans le changement à venir.
On peut ensuite visiter l’endroit sans que cela n’engage le processus de deuil. On peut notamment visiter les jardins, les différents coins etc. C’est un travail d’adaptation.
Faire participer son proche à la décision
Dans le cas où le maintien à domicile n’est plus possible et le placement inévitable pour des raisons de santé et de sécurité, il est important de prévoir des visites d’établissements ensemble, pour permettre à votre proche de participer à la prise de décision. L’écoute est primordiale à cet âge. Il ne faut pas donner l’impression que vous prenez la décision pour lui, mais plutôt inclure votre proche dans ce processus.
En tant qu’aidant aussi, vous avez le droit de prendre le temps de vous familiariser avec ces espaces pour vous rassurer sur les conditions de vie de votre proche. Des personnes comme l’assistante sociale ou le psychologue aident à la transition. Il faut que la famille et les aidants interrogent l’Ehpad. Entrer dans un Ehpad est couteux et ça demande du temps. C’est une situation d’urgence, d’où l’importance de la prévention.
Faire appel à un médiateur
Les aidants n’ont pas toujours les ressources pour aborder le sujet d’une admission, c’est pour cela que des aides et des solutions existent. Vous pouvez faire appel à de nombreux médiateurs qui peuvent vous aider à faire intégrer à votre proche, la nécessité d’entrer dans un établissement, pour sa santé et sa sécurité. Il sera plus facile qu’une personne autre que son parent, sa famille ou ses aidants lui parle de son admission en établissement spécialisé.
- Médecin : il peut expliquer les risques pour la santé et la sécurité de votre proche de rester à son domicile à son âge (chutes, oubli des médicaments, sous-alimentation etc.).
- Assistante sociale : peut vous aider à aborder de nouveau le sujet en expliquant qu’il s’agit d’une solution de protection. Avoir une personne extérieure à son cercle peut être bénéfique.
- Psychologue : peut rassurer votre proche quant à son entrée en maison de retraite et à ses différentes peurs. Cependant, concernant l’intervention d’un psychologue, cela peut parfois s’avérer compliqué.
Céline Martinez, psychologue clinicienne, nous donne quelques éléments de compréhension quant à la réticence des personnes âgées à parler à un psychologue. “Aujourd’hui, on s’occupe des personnes nées dans les années 30, pour lesquelles il est difficile d’aller voir un psychologue, car cela n’est pas dans les mentalités. L’aidant doit comprendre que même s’il fait le maximum, cela ne s’enclenche pas. Pour pouvoir y arriver, il doit s’entourer d’une équipe pluridisciplinaire (médecins, kinésithérapeutes, orthophonistes, aides-soignants, esthéticiennes). Ce sont des biais qui permettent d’entrer en contact avec les personnes âgées.”
Le consentement est-il obligatoire pour un placement en EHPAD ?
Oui, le consentement de la personne âgée est requis pour une entrée en EHPAD, tant qu’elle est capable de comprendre sa situation et de prendre des décisions. Même en cas de perte d’autonomie physique, elle ne peut pas être placée contre sa volonté.
Si elle souffre de troubles cognitifs majeurs altérant son discernement, une mesure de protection juridique (curatelle ou tutelle) peut être envisagée. Dans ce cas, le tuteur peut légalement autoriser le placement, à condition que cela soit dans l’intérêt de la personne.
Le refus de placement ne suffit pas à justifier une mesure de contrainte : seule une évaluation médicale et une décision judiciaire peuvent permettre un placement sans consentement.