Alzheimer : Un homme tient la main de sa femme

Alzheimer : reconnaître les premiers signes

Pertes de mémoire, comportements déroutants et inhabituels, perte d’autonomie… Le diagnostic de la maladie d’Alzheimer permet la prise en charge du proche et aux aides. Quelques notions à connaître


L’entourage est en première ligne pour détecter les signes laissant présager un début de maladie d’Alzheimer chez un proche. Mais comment distinguer des petits oublis ou troubles liés à de la fatigue ou au vieillissement cérébral naturel d’un réel déclin cognitif nécessitant une consultation ?

Pour le Dr Véronique Lefebvre des Noëttes, spécialisée en psychiatrie du sujet âgé, qui accompagne les patients atteints d’Alzheimer et leurs proches depuis plus de 32 ans: si vous avez le moindre doute, il ne faut pas hésiter à se rendre dans une “consultation mémoire de proximité (CMP)“Plus tôt on est repéré et intégré dans un parcours de soins, meilleure est la qualité de vie du malade et de ses proches.”

En effet, s’il n’existe pas à ce jour de protocole permettant de guérir la maladie d’Alzheimer, certains traitements associés à des thérapies non médicamenteuses peuvent ralentir l’avancée de la maladie et améliorer le quotidien du malade, mais aussi de l’aidant. Entre aide à domicile pour les gestes du quotidien, aides financières, et congé pour s’occuper de son proche… les ressources existantes dédiées et adaptées aux besoins du proche et ceux qui l'accompagnent ne seront accessibles et définissables qu’après la confirmation du diagnostic et ajustables en fonction du suivi de son avancement.

Les profils les plus à risque

Contrairement à ce que beaucoup pensent, la forme héréditaire est rare (moins de 1%1 des cas). L’historique des recherches rapporte que les principaux facteurs de risque favorisant le développement de cette pathologie neurodégénérative sont :

  • L’âge : la maladie d’Alzheimer et apparentées touchent principalement les plus de 65 ans, avec près de 5 % de cette tranche d’âge touchée, puis elle augmente proportionnellement jusqu’à atteindre plus de 20 % chez les personnes de plus de 80 ans. Néanmoins, il y a des formes plus rares, mais existantes, d’Alzheimer précoce, qu’on appelle aujourd’hui “Alzheimer jeune” (plus de 65 0000 personnes estimées en France) généralement liée à la forme familiale,

  • Le sexe : sur 25 patients diagnostiqués, 10 sont des hommes et 15 sont des femmes, selon les chiffres de l’Inserm. Néanmoins, cela pourrait s’expliquer par la différence d’espérance de vie,

  • Le niveau socioculturel : bénéficiant d’une meilleure réserve cognitive, les personnes ayant un niveau d’étude et d’activité professionnelle plus élevé seraient moins touchés,

  • Les troubles de santé provoquant une mauvaise oxygénation du cerveau :les problèmes cardio-vasculaires, le diabète, l’hypertension artérielle etle cholestérol représentent des facteurs de risque plus importants,

  • Les microtraumatismes crâniens (chez les sportifs de combat notamment).

Distinguer un simple oubli d’un trouble pathologique

Tout le monde a des trous de mémoire de temps en temps, mais plus on vieillit, plus ils peuvent devenir préoccupants, le spectre de la maladie d'Alzheimer et ses conséquences comlexes étant relativement anxiogènes.

Même s’il ne faut pas hésiter à demander l’avis d’un médecin, il est bon pour se rassurer ou se convaincre, de connaître, les facteurs de gravité de référence qui poussent les professionnels à se poser des questions. Il y en a essentiellement trois :

  • L’impact sur la gestion de la journée,

  • Leur récurrence,

  • Une difficulté à gérer des actes qui ne posaient pas de problème jusque-là : si la personne avait l’habitude de gérer tous ses rendez-vous et se met subitement à les oublier très souvent, si elle a du mal à effectuer une recette familière, etc.

“Les troubles de la mémoire sont les premiers signes de la pathologie, car son déclenchement est causé par deux protéines anormales (l’Aβ amyloïde entre les neurones constituant les plaques amyloïdes et la protéine TAU dans les neurones qui provoquent leur dégénérescence) qui impactent l’hippocampe, zone à l’intérieur du cerveau émotionnel et passage obligatoire de la mémoire”, explique le Dr Véronique Lefebvre Des Noëttes. En général, c’est la mémoire immédiate qui est touchée. Les souvenirs lointains et émotionnels restent intacts au début. “Attention à ne pas s’imaginer le pire en cas d’oublis ponctuels de noms propres, ce type d’oubli arrive chez 100% des plus de 50 ans, tient à rassurer la spécialiste. Il arrive souvent qu’on ne puisse pas se souvenir du nom d’un acteur, ou une personne rencontrée, par exemple. Mais cela nous reviendra plus tard. Il ne s’agit pas d’un symptôme type à Alzheimer, c’est simplement qu’on manque de circuits mnémotechniques pour s’en souvenir.”

À partir de là, peuvent s’ajouter d’autres troubles, en fonction des zones du cerveau touchées, dont l’ordre et la manifestation ne sont pas systématiques et varient d’un patient à l’autre :

  • Un retrait social : la personne ne se lève plus, abandonne ses loisirs, ne va plus vers les autres, elle s’isole,

  • Des troubles de l’humeur : des signes psychiatriques de persécution, une forte anxiété soudaine et répétée. La personne doute d’un proche pour lequel cela n’a jamais été le cas.

  • Des signes de dépression ou une apathie : incapacité à être ému ou réagir, perte de motivation,

  • Des difficultés de planification, de concentration : avoir du mal à compter, faire ses papiers, effectuer une double tâche ou suivre ses rendez-vous, alors qu’on avait l’habitude de le faire correctement,

  • Une désorientation dans le temps : ne plus être capable de donner la date, la saison malgré des signes évidents comme des fortes températures ressenties ou l’inverse,

  • Une désorientation dans l’espace proche : se tromper dans ses circuits habituels comme ne plus savoir aller à sa boulangerie ou trouver les pièces chez soi,

  • Une modification de l’écriture,

  • Une tendance à oublier souvent ses affaires du quotidien et accuser les autres,

  • Des difficultés à réaliser des tâches familières : ne plus pouvoir faire à manger, aller faire les courses plusieurs fois et acheter plusieurs fois la même chose.

Au fur et à mesure que la maladie évolue, d’autres signes peuvent se manifester :


  • Des troubles du langage : ne pas terminer des phrases, désigner un objet par le mauvais nom (on parle de quelque chose de vraiment troublant comme dire “passoire” pour désigner un téléphone),

  • Des difficultés à reconnaître ses proches,

  • Une altération du jugement : des prises de décisions qui mettent en danger la santé, la sécurité et/ou le budget.

Diagnostic : vers qui se tourner ?

Plus le diagnostic est fait tôt, plus les chances de ralentir l’avancée de la maladie et améliorer le bien-être du patient et de sa famille sont favorisées. Si vous constatez que votre proche cumule plusieurs de ces signes et de ces facteurs de risques, ou au moindre questionnement, il ne faut pas hésiter à consulter, même si c’est juste "pour se rassurer". La première personne vers qui se tourner est le médecin traitant. C’est lui qui saura faire un premier tri parmi les difficultés rencontrées par votre proche. Il déterminera s’il faut directement entamer des démarches pour un diagnostic de maladie d’Alzheimer et apparentées au travers notamment d’une consultation mémoire de proximité, ou bien si un bilan préalable complet est nécessaire pour éliminer le risque d’autres troubles ayant des similarités avec Alzheimer.

Effectuée dans certains hôpitaux ou par des spécialistes libéraux, la consultation mémoire permet de confirmer ou non la présence de la pathologie neurodégénérative. Elle se déroule sur une journée à l’hôpital de jour (prise en charge à 100 %) où votre proche verra différents spécialistes qui, après étude de ses habitudes de vie, ses antécédents familiaux, et des difficultés qu’il traverse, lui feront passer des bilans médicaux, ainsi que des tests cognitifs. On lui proposera également une IRM cérébrale, une prise de sang, avant de pouvoir, sur ce faisceau d’arguments, un diagnostic de probabilités ou de possibilités de maladie d’Alzheimer ou troubles apparentés.

Si la présence de la pathologie est suspectée et confirmée par la suite, il en découlera la prescription d’un protocole de prise en charge personnalisée.